René VIDAL
par André ESCARD
En Octobre 92, j'recherchais des créatures-teurs singuliers, des purs, des vrais, dans les parages
des Pyrénées Zatlantiques : zéro, tintin, nib...
Cornebidouille, me dis-je alors : le Ténéré ???
Pi un jours, on m'turlute qu'y a un r'traité des pétroles, prés de Lacq, qu'à fait des zoiseaux
zavec des vieilles pompes du gisement.
Moi, j'suis l'enfant sage : j'écoute c'qu'on m'dit.
J'y vas donc, vers the lieu.
Et v'la la découverte, la chouette, le v'lours rouge, la peau satinée, la réalité rêvée devant les
yeux, et dans les tripes :
VIDAL (René, de son pronom)
Ca c'est du mec comme je cherchais, mais i n'est pas plus r'traité que l'Jean-François Maurice,
ou qu'la Danielle Jacqui, ou qu'les adorables cairotes de Salernes ou qu'la fée Marie
Morel...
L'ben vivant; j'vas vous dire.
René VIDAL est né dans le LOT (si cher au grand mécano de
Gazogène), en 1945 (une d'évitée, il a du pot).
C'était à Biars-sur-Cère, à 40 km au nord de Figeac, avec un père savetier
à côté, à Bretenoux, chez qui naît son goût du bois, du beau travail du
bois, brut, débité, équarri, poncé, sculpté, peaufiné, odorant, soie sous
la main (les tout qu'est-ce q'y faut, comme on f'sait jadis).
Et ça l'mène, le René, aux Beaux arts de Bourges (1965-1969), à
l'atelier de sculpture de Marcel Gili, puis au diplôme national de cette
spécialité.
Dès 1971 : expos personnelles et en participation.
En 79, il s'installe (et y reste), à MOURENX (Pyrénées Atlantiques),
au lieu-dit "La Chêneraie", postalement codé 64150. C'ta 4km Sud de
Lacq, et à 20 km ONO de Pau.
Il est prof d'art plastique à Artix (à 6 km de Mourenx)
Il est marié à une femme adorable. 3 enfants.
V'la l'homme: classique, jeune, beau mec.
Mais y a les zieux, et les circonvolutions céréb.
Alors çà explique la magie du reste!!!
Ce que j'ai
adoré chez le jeune homme mince, de 47 ans, aux yeux bleus, c'est sa créativité époustouflante, sa
délicatesse de caractère et de tons picturaux, sa simplicité, sa gentillesse.
Mais derrière, quelle force (David Hercule) quelles associations d'atomes accrocheurs, quel
envoûtement de formes et de couleurs, et de justesse de tons, de nuances, quelle invention de
transmission de pensées, d'images, de sentiments, de sensations. Ah ! là, oui, j'aime.
Alors, on y vient à ses oeuvres ???
En premier lieu, pour moi, ses sculptures, toutes de finesse, ses Vénus aux bras, jambes, corps, yeux,
enlaçant, poulpeux, dansants, avec des couleurs d'éblouissement de petits matins (le saphir, émeraude,
rose indien...) :
-Les soeurs jumelles (1987)
-Le couple au banc (1988)
-Saga lumineuse
-Chaud et froid : beau comme du verre fondu en tous sens, tordu aux
15 coloris diaprés
- Routes de l'été
- Femme avec les yeux dans
les mains
- Furtivement, j'ai pris votre tête parfumée
- La femme aux ressorts (acrobate nue, horizontale dans l'air, avec
ressorts dessous et dessus)
- Bataille à la lumière noire (poulpe jaune et bleu)
Ensuite les boîtes genre
surréaliste, Duchein...fermées, ouvrables, avec taquets, tiroirs,
chevilles...
- Stère rouge (couleur somptueuse)
- Rêves
- Boîte pour un rayon de
soleil : pied et dehors de la boite noirs, avec dedans un pichet
coiffé de plumes blanches
- Sabot bleu
(de forme splendide se désarticulant (hommage au père de René)
- Réserve de Caza
:
. Dehors
: la montagne, en plusieurs escaliers bleutés, dans les rocs
. Dedans
(ouvert) : genre toenias ou ceintures trouées entrelacés.
Panneaux en bois sculpté
en profondeur et en tous sens, et peints :
- La bataille noire
(2 côtés noirs, et centre or)
- La bataille d'Uccello
(dorée, avec lance, chevaux et cavaliers stylisés)
Planches de papiers collés, à la gloire des différents cafés ou n'est-ce-cafés mondiaux.
Que d'invention, dans tout cela, de génie créateur, avec des formes inhabituelles, tentaculaires mais harmonieuses, à la perfection, et ces teintes fondantes, multiples, tendres ou très vives, et ces boîtes célestement mystérieuses.
Et puis dehors, dans le jardin, la sculpture grandeur nature de la vache blonde des Pyrénées, en bois venant de l'eau, mais couverte de plastique vert (contre pneumonies et moisissures).
Après tout cela (éblouissant) un autre jour, ce qu'on m'avait signalé dès l'abord :
les pompes-oiseaux
de la ville de Pau.
Ce fut bien ce que je présupposais, des pompes à pétroles de Lacq, décorées, par la
grâce d'René Vidal,
en oiseaux colorés, qui rajeunissent agréablement le paysage du Béarn industriel (Lacq est tout près).
Allez à Mourenx, chez René : c'est une féerie.
Moi, sûr, avec mes amis Dan et Gilles (du coin) j'y
retournerai.
Car cet homme courtois, affable, gentil, gai, les yeux clairs et doux, mais malins et rieurs,
eh !
bien, vous vous en doutez, maintenant : il a du génie dans son "Indedins", son crâne, ses
tripes.
C'est chouette, les pompes-oiseaux de Pau.
Mais les sculptures, les maquettes, les boites (en bois ou polyester finement
poncé et sublimement peint), ça, on a envie, illico, d'en séquestrer le
créateur, de louer un camion énorme, et de tout emporter chez soi, pour, avec
des amis ou des amies, les contempler, les palper, les admirer, entre nous
seuls.
Et puis on te libérerait après quelques semaines, car on ne te veut pas de
mal, René.
T'as toute la beauté du monde dans les mains et les circonvol. mentales.
Bravo à toi.
T'es un homme-ange.
André ESCARD
Les Crapottes, 17 Novembre 1992 in GAZOGENE N°V, Cahors, 1992